Le Made In France est actuellement l’une des tendances majeures de la création d’entreprise. Que ce soit pour limiter l’empreinte carbone, soutenir l’économie locale et l’emploi ou pour donner gage de qualité, le 100% français arrive sur le devant de la scène. Mais entre les labels reconnus et les stratégies marketing trompeuses, il est parfois difficile pour les consommateurs de s’y retrouver.
À l’heure post-pandémie, on vous explique tout sur les tendances actuelles, les attentes des Français et l’avenir du Made In France.
LES CRITÈRES D’ÉLIGIBILITÉ
« Fabriqué en France », « Conçu en France », « Origine France Garantie »… Nombreuses sont les mentions qui valorisent l’origine des produits manufacturés. Mais alors comment s’y retrouver ?
Selon la définition inscrite dans le Code des Douanes : « Est considéré comme “Made In France” tout produit dont la dernière étape substantielle a été réalisée en France et dont au moins 45 % de la valeur ajoutée est originaire de la zone ».
Un produit pourra donc porter la mention “Made in France” s’il est fabriqué en France alors même que certains matériaux ne sont pas d’origine française.
Il existe différents labels qui permettent de garantir l’origine française. Parmi les plus courants, on y retrouve :
L’indication géographique :
Elle atteste que le produit possède des qualités du fait de son origine géographique. Les produits peuvent obtenir cette indication lorsqu’ils respectent le cahier des charges spécifique à chaque indication géographique.
Entreprise patrimoine vivant :
Cette reconnaissance distingue les entreprises aux savoir-faire artisanaux et industriels d’excellence. Outre la fabrication française, les critères de détention d’un patrimoine économique spécifique, les critères de savoir-faire rare et spécifique et enfin des critères d’implantation géographique viennent s’ajouter.
Origine France Garantie :
Cette certification privée émise par l’association Pro France est apposée sur des produits réalisés en France. Elle permet de garantir que le produit prend ses caractéristiques essentielles en France et qu’entre 50 et 100 % du prix de revient unitaire du produit est français. Cette certification étant payante, elle ne permet pas aux petites entreprises avec peu de moyens d’en bénéficier.
France Terre Textile :
Ce label récompense les articles textiles dont plus des trois quarts des opérations de production sont réalisées en France selon des critères de fabrication en circuit court, de qualité et de RSE.
DES STRATÉGIES MARKETING TROMPEUSES
Malgré l’existence de labels reconnus, des entreprises n’hésitent pas à jouer sur les codes du bleu-blanc-rouge par opportunisme. Certaines d’entre elles utilisaient notamment des logos faisant allusion à une origine française comme le drapeau tricolore ou le coq illustré, sans nécessairement que les produits vendus soient considérés comme Made In France.
C’est ce qu’on appelle le “franco-lavage”, encore appelé « french washing« .
Une stratégie marketing qui trompe les consommateurs. Cette technique de vente touche aujourd’hui tous les secteurs selon Yves Jégo, fondateur d’Origine France Garantie et directeur du magazine Produire en France. Celui qui milite depuis 10 ans contre ce fléau explique les conséquences désastreuses sur l’économie et sur les emplois qui sont supprimés à cause des délocalisations.
En France, le marquage d’origine est facultatif. Il n’existe aucune obligation légale ou réglementaire qui impose le marquage d’origine sur les marchandises importées ou commercialisées au sein de l’Union Européenne, à l’exception des produits agricoles comme les fruits et les légumes. Seul le Code des Douanes oblige à respecter les règles d’origine non préférentielle. En cas de non-respect, des sanctions pénales pour pratiques trompeuses peuvent être retenues. Le contrevenant encourt deux ans d’emprisonnement et une amende de 300 000 euros.
Pourtant, en 2014 lors de la discussion de la loi dite Macron, un amendement pour permettre de réserver l’utilisation du drapeau français uniquement aux produits français avait été soumis à l’Assemblée Nationale. Une proposition finalement rejetée sous la pression des lobbies du patronat.
À l’inverse, la Suisse a adopté en 2017 une législation réservant l’usage de son drapeau exclusivement aux produits helvétiques.
LE MADE IN FRANCE EN 2021
Le sujet du Made In France est né après la crise économique de 2008. Alors qu’elle faisait gage de qualité et de savoir-faire dans les années 2010, l’origine française va aujourd’hui beaucoup plus loin.
Un acte de patriotisme économique : La crise sanitaire a donné un nouvel élan au Made In France qui s’appuie désormais sur des valeurs de résilience, d’autonomie et de souveraineté. Elle a poussé de nombreux Français à consommer local. Selon une étude menée par Opinion Way pour l’agence Insign, 61 % des sondés déclarent acheter le plus souvent possible des produits fabriqués en France depuis la crise sanitaire.
Par ailleurs, 81% des Français affirment qu’ils pourraient acheter moins de produits en quantité pour acheter un produit fabriqué en France. Un budget qui s’adapte puisqu’ils seraient prêts à payer 7,60€ de plus pour un tee-shirt français contre un tee-shirt de fabrication chinoise. Du côté du commerce en ligne, l’achat français a lui aussi le vent en poupe. Cet attrait s’explique par la volonté de soutenir les marques françaises mais également par le besoin d’interagir avec un service après-vente localisé en France.
S’engager en faveur de la planète : L’environnement est une autre raison essentielle du consommer français. 42% des Français affirment être attentifs au respect de la planète et choisir d’acheter des produits français issus de circuits courts. Car acheter français permet de réduire l’empreinte carbone liée au transport et à la production. Selon la Fédération Indépendante du Made In France (FIMIF), l’importation d’un produit en France génère 58% plus d’émissions de CO2 qu’un produit fabriqué en France.
Un avantage concurrentiel pour les entreprises : De plus en plus d’entreprises prennent conscience que mettre en avant l’origine française de leur production les distingue aux yeux des consommateurs qui sont en quête de vérité. 69% des chefs d’entreprises ayant l’essentiel de leur activité basée en France observent une accélération de leur chiffre d’affaires.
Le Made In France devient un enjeu stratégique de communication. Véritable tendance de 2021, certaines marques n’hésitent pas à revendiquer leur tampon bleu-blanc-rouge pour mettre en avant leur production locale. C’est notamment le cas de marques telles que Le Slip Français, Amor Lux ou encore Saint-James. Et pour cause, ce sont les premières marques citées par les consommateurs interrogés pour l’étude Opinion Way.
Depuis le 11 octobre, Amazon a lancé sa boutique du « fabriqué en France”. Une création valorisée sur le site dès la homepage pour mettre en avant les produits fabriqués en France, ou dont la transformation substantielle à a été réalisée en France. 230 000 produits sont pour l’instant présents. Le géant de la vente en ligne souhaite inciter encore plus de vendeurs tiers à se référencer sur sa marketplace grâce à un martelage de l’ancrage local.
L’AVENIR DU MADE IN FRANCE
Aujourd’hui, où en sommes-nous depuis la crise sanitaire ? Que nous réserve le Made In France dans les années à venir ?
De la pénurie de masques jusqu’à l’échec initial de Sanofi à produire un vaccin, la pandémie aura révélé la dépendance de la France face aux importations étrangères. Même si la crise sanitaire a touché le monde entier, l’Hexagone a été beaucoup plus impacté par la désindustrialisation liée à la division internationale du travail.
En cause, un déficit d’innovation mesuré au nombre de brevets par millions d’habitants français, inférieur par rapport aux autres pays industrialisés.
Pour faire face à cette interdépendance, depuis un an le gouvernement a remis à l’ordre du jour des discussions sur le sujet de la relocalisation industrielle. À ce jour, le plan France Relance a accordé 3 milliards d’aide à 8 885 entreprises. L’objectif : accélérer la modernisation des lignes de production afin de créer “un choc de réindustrialisation” selon les mots de la ministre déléguée Agnès Pannier-Runacher.
Mais le challenge du 100% Made In France reste compliqué. Pour rester dans la course mondiale à l’innovation, la France privilégie des alliances industrielles avec d’autres pays européens, faute d’avoir la taille critique pour supporter seule de lourds investissements. Des alliances appelées “PIIEC” (Projet Important d’Intérêt Européen Commun) ont été conclues à l’initiative de la France et de l’Allemagne dans les secteurs des batteries électriques et de l’hydrogène.
À défaut d’être 100% français, le futur Made In France sera-t-il européen ?